Quelques exemples de petits chromidotilapines :
Congochromis sabinae :

Enigmatochromis lucanusi :


Nanochromis transvestitus :


Pelvicachromis taeniatus


Bonjour!

Comme la question revient souvent sur le forum, j'ai décidé d'écrire un petit article rassemblant quelques éléments utiles sur la maintenance et la reproduction des petites espèces de cichlidés fluviatiles (Pelvicachromis, Enigmatochromis, Nanochromis, Congochromis...) pour les personnes tentées par ces espèces , qu'elles soient débutantes ou expérimentées mais désireuses d'élargir leur horizon

Intérêt des petits fluviatiles
- Originalité : au niveau comportemental, les Pelvica / nano & co forment des couples très soudés au sein desquels la communication est très intense et variée, ce qui n'est pas si courant que ça chez les espèces pondeuses sur substrat caché (ce sont peut être les lamprologini et les Crenicichla qui s'en rapprochent le plus). Ainsi, chaque cichlidophile peut y trouver son compte sans avoir une impression de déjà vu

- Couleurs : la plupart des espèces arborent de superbes couleurs, qui peuvent varier très rapidement et du tout au tout. De nombreux patrons de coloration sont visibles selon l'éclairage, la situation et la position hiérarchique. Cette variabilité chromatique fait une partie du charme de ces petits poissons
- Petite taille et agressivité limitée chez certaines espèces: elle permet de maintenir ces espèces dans des bacs relativement petits
- deux intérêts relativement opposés : selon les espèces, l'extrême facilité de maintenance et de reproduction (pour les débutants) ou au contraire le challenge que représente la maintenance à long terme et la reproduction (Congochromis, Parananochromis, Pelvicachromis du groupe humilis)
- prolificité relativement faible (15 à 80 jeunes en général)
Les espèces recommandées :
- tout dépend évidemment du niveau aquariophile et de l'expérience cichlidophile : un débutant en aquario pourra maintenir avec succès et reproduire certaines espèces (catégorie 1), tandis qu'un éleveur d'apisto expérimenté qui ne débuterait qu'en fluviatiles et aurait donc déjà une grande maîtrise des eaux noires pourra se tourner directement vers les espèces acidophiles (catégorie 2)
- catégorie 1 : dans les espèces accessibles aux débutants et peu difficiles sur les paramètres de l'eau : Pelvicachromis taeniatus Moliwe, Lobe / Nyete, Wouri, Nigeria, kienke, Pelvicachromis subocellatus, Pelvicachromis sacrimontis, Pelvicachromis pulcher, Nanochromis parilus, Steatocranus casuarius, Steatocranus tinanti, Anomalochromis thomasi d'élevage. Egalement les Pseudocrenilabrus, à la maintenance différente du fait de leur mode de reproduction (incubation buccale, polygynie)
- catégorie 2 : Enigmatochromis lucanusi, toutes les espèces des genres Parananochromis et Congochromis, Pelvicachromis roloffi, Pelvicachromis du groupe humilis : P. humilis, P. rubrolabiatus, P. signatus, Nanochromis transvestitus.
Matériel :
- un bac de 54l à 120l pour un couple formé
- une filtration fiable mais pas trop puissante (3x le volume du bac par heure maxi)
- décor : racines, demi péricarpes de noix de coco percées, roches non calcaires, sable non calcaire et non coupant (sable de loire, sable pour filtre de piscine). Il est impératif de ménager des plages de sables et de fournir des lieux de ponte potentiels : cavités pas trop vastes à entrée étroite. Les nanochromis aiment beaucoup les grottes enterrées (grosse pierre plate apparaissant comme posée sur le sable mais soutenue par 3 ou 4 roches posées sur le fond du bac)
- quelques plantes robustes (Bolbitis, Microsorum, Ceratophyllum, Ceratopteris, Pistia, Anubias...)
- un osmoseur ou un dispositif de collecte d'eau de pluie (pour certaines espèces et en fonction des paramètres de votre eau de conduite)
- pour les espèces acidophiles : quelques pignons d'aulne, feuilles de Terminalia, feuilles de chêne
Trouver les poissons :
- Certaines espèces sont régulièrement disponibles sur les stocklists des grossistes, on peut donc commander des poissons chez son détaillant, le problème étant dans ce cas là d'être sûr de l'identité des poissons reçus. C'est pourquoi il est préférable, si l'on passe par le commerce, de choisir des poissons facilement identifiables : Pelvicachromis taeniatus Lobe / Nyete, taeniatus wouri, subocellatus matadi, sacrimontis, Nanochromis parilus par exemple.
- Iktus aqua propose des poissons rares, de qualité, et bien identifiés dans 98% des cas. C'est une piste à ne pas négliger!
- L'on peut également en trouver chez des éleveurs amateurs ou dans des clubs. Généralement pour les espèces les plus communes, il n'est pas difficile d'aiguiller quelqu'un vers un éleveur.
- règle importante lors de l'acquisition : celle du 1 poisson par sac. Même un couple formé peut s'entretuer pendant le transport.
Quels colocataires?
Epiplatys dageti



Procatopus similis

Aplocheilus lineatus


Fundulopanchax gardneri


Eutropiellus sp.

- En règle générale, il est préférable de ne pas maintenir les fluviatiles africains en bac spécifique strict : les risques d'agression dans le couples sont alors multipliés, et les poissons sont plus timides. Cependant, il faut s'assurer que les colocataires pourront se soustraire aux charges des cichlidés, grâce à une plantation fournie en surface (killies) et en pleine eau.
- Si l'on désire reproduire ses pensionnaires, il vaut mieux choisir des colocs non paedophages. A contrario, si l'on ne désire pas garder de jeunes, l'introduction de prédateurs potentiels peut être envisagée si la taille du bac le permet (Microsynodontis par exemple).
- Dans un petit bac (60-80 litres) le choix des colocataires est limité : un petit groupe de Barbus jae, un quatuor d'Epiplatys ou de Fundulopanchax ou de Procatopus, ou un petit groupe de Nannocharax.
- Dans un bac de 120 à 200l, on peut envisager des petits alestidés, des Barbus un peu plus gros comme B. barilioides, des Synodontis nigriventris, voire un petit groupe d'Eutropiellus. Dans le cas d'une maintenance en eau relativement fraîche, des Microctenopoma peuvent être envisagés
La maintenance :
- en règle générale, la maintenance ne pose pas de problème si l'on prend garde à faire une acclimatation la moins stressante possible, et si l'on évite par la suite des changements de paramètres trop rapides / amples/
- t°c : en règle générale, il est préférable de ne pas dépasser les 25°c. Il est possible d'obtenir des reproductions à 24°c voire à 22°c, et les poissons vivront plus longtemps
- dureté et pH : à adapter en fonction de l'espèce. Ces paramètres, comme la t°c, influent sur le sex ratio des jeunes, et chez certaines espèces, sur l'éclosion ou non des oeufs. Il faut donc bien se renseigner sur les besoins de chaque espèce. Hors espèces acidophiles, il faut veiller à ce que le pH et la duretés ne soient tout de même pas trop élevés, les paramètres adaptés à la maitnenance des cichlidés des grands lacs africains sont trop extrêmes pour une maintenance satisfaisante des fluviatiles.
- changements d'eau : lors des changements d'eau, il faudra veiller à ce que l'eau neuve soit à peu près à la même t°c et aux mêmes paramètres que l'eau du bac.
- pathologies : les petits chromidotilapines sont exposés à certaines maladies, que de bonnes conditions de maintenance permettent souvent d'éviter : hydropisie / gros ventre (eau de mauvaise qualité, nourriture trop riche ou nourriture vivante porteuse de germes) ; problèmes mélaniques (petites taches noires sur la partie céphalo-dorsale, voire parfois une moitié ou l'intégralité de la tête colorée en noir) peut être liés à un virus ou à une mauvaise qualité du sol. Cela peut disparaître tout seul, persister sans autre problème ou entraîner la mort ; points blancs : ce problème se pose le plus souvent suite à un refroidissement ou après un transport. Les traitements classiques (sel, APB) fonctionnenet généralement bien ; parasites branchiaux ou intestinaux : surtout sur les sauvages. L'important est de savoir le déceler et d'agir si l'infestation est aigüe.
La nourriture :
- Les chromidotilapines (Pelvicachromis, Nanochromis...) sont assez sensibles au niveau digestif. Il faut donc veiller à ne pas les nourrir en trop grande quantité, ni trop richement. Personnellement, je nourris les miens principalement avec de la nourriture sèche, mais variée.
- Les Pelvicachromis et Nanochromis en particulier se nourrissent en filtrant le substrat, il faudra veiller à ce que la nourriture tombe au sol.
La reproduction :
- Les Pelvicachromis, Nanochromis, Congochromis, Parananochromis, Steatocranus et Enigmatochromis sont des espèces pondeuses sur substrat caché, qui forment des couples stables et chez qui les deux membres du couple participent à la garde des jeunes. Il est donc primordial que les poissons puissent se choisir. La meilleure stratégie est donc d'acquérir un petit groupe de subadultes. Dans le commerce, les poissons sont souvent vendus par paires. Acheter une paire revient à jouer à la loterie, avec des issues variables : formation d'un couple harmonieux, formation d'un couple qui se reproduira mais chez qui les scènes de ménage seront fréquentes (certains mâles et certaines femelles chassent leur partenaire pour garder seuls les jeunes, et il peut même y avoir meurtre), ou paire qui ne pondra jamais, ne s'entendant pas. On peut cependant tenter de forcer la chance en ajoutant des colocataires et en tentant le fameux truc du miroir : un mâle ou une femelle violent ou peu intéressé par la gaudriole pourra être circonvenu en lui montrant plusieurs fois par jour son reflet dans un miroir de poche. Croyant avoir un / une rival, il / elle peut alors changer radicalement de comportement envers son partenaire. Cela ne marche pas à tout les coups, mais ça vaut la peine d'essayer! Autre méthode proche : mettre le bac à côté d'un autre bac hébergeant des petits cichlidés territoriaux (fluviatiles ou non). Les intimidations à travers les vitres pourront contribuer à souder le couple. Troisième méthode en désespoir de cause : la marionnette (photo du mâle ou de la femelle fautif, de préférence toutes nageoires dressées, imprimée à l'échelle 1/1 et collée au bout d'un bâton qu'on promène devant la vitre frontale):D . Faut être un peu malade et de préférence seul, mais ça peut marcher (2 fois chez moi)!
- Il n'a a pas de période de reproduction en aquarium, ces poissons pondent toute l'année.
- Une stimulation (gros changement d'eau, augmentation légère de la température et distribution fréquente de nourriture riche ou appétissante) est parfois nécessaire pour obtenir une ponte, mais la plupart du temps les couples formés pondent même si les paramètres de maintenance ne varient pas.
- Il est important que les poissons puissent choisir leur lieu de ponte, et donc de proposer plusieurs lieux de ponte potentiels, si possible variés. Une entrée étroite est préférable. Creuser fait partie du rituel d'avant ponte, la couche de sable devra donc être suffisamment épaisse, et le substrat dépourvu de sol nutritif. Remplir les lieux de ponte potentiels de sable peut également aider, le couples les videra ensemble, ce qui participe à souder le couple.
- selon les espèces et les couples, le partage des tâches varie du partage strict (aux femelles le soin des oeufs puis des larves, au mâle la défense du territoire) à l'inversion de ces rôles, en passant par un partage quasiment indifférencié. Quoi qu'il en soit, les colocataires doivent disposer de cachettes car la force de frappe d'un couple de Pelvicachromis ou de Nanochromis qui attaquent à deux peut rapidement
conduire à la mort des gêneurs. Cachettes, plantes de surface et barrières visuelles sont donc indispensables.
- La garde des parents est le plus souvent exemplaire et très intéressante à observer, avec des passages de relais entre le mâle et la femelle. Le soir, de 30 minutes à 1heure avant extinction, les jeunes sont regroupés devant une cavité qui peut être le lieu de ponte ou une autre grotte, puis rentrés pour la nuit. Il est donc indispensable que l'éclairage s'allume et s'éteigne à heures fixes, faute de désorienter complètement les parents et de les voir entrer en conflit ou manger leurs jeunes.
- Dès la nage libre, les alevins de la plupart des espèces sont assez grands pour dévorer des nauplies d'Artemia. On peut également donner des pastilles ou paillettes réduites en poudre qui sont généralement bien acceptées une fois qu'on a trouvé la bonne marque. De plus, pendant la journée, les jeunes sont conduits partout dans le bac par les parents. La présence d'algues et de plantes est un plus, car les petits semblent trouver tout un tas de micromets délicieux en les picorant. Un bac nickel, aseptisé, ne doit donc pas être considéré comme un idéal, même s'il faudra prendre garde à la formation de mulm néfaste. De plus cette microfaune permet aux alevins de patienter entre deux distributions de nourriture.
- Les petits chromidotilapines gardent souvent leurs jeunes sur une période relativement longue, allant de 3 à 8 semaines. Selon que le couple veuille pondre de nouveau immédiatement ou pas, et selon le caractère des poissons, les jeunes sont chassés avec violence ou peuvent être tolérés voire protégés de façon lâche jusqu'à la nage libre suivante. En moyenne, ceux-ci sont matures lorsqu'ils atteignent une taille de 50mm LT pour les mâles et 35mm LT pour les femelles, à l'âge de 6 à 8 mois. Selon les espèces, les jeunes sont sexables plus ou moins longtemps avant.
Conclusion :
Dans ce petit article je me suis volontairement focalisé sur les chromidotilapines. Cependant quelques autres petites espèces peuvent être envisagées par un débutant en fluviatiles :
- Petits Steatocranus (casuarius, bleheri, gibbiceps, voire tinanti) : mode de reproduction identique aux Pelvica, nano, etc. Mais parfois des tendances polygynes. Prendre garde à maintenir le taux d'O2 dissout élevé.
- Anomalochromis thomasi . Principale différence : instinct grégaire plus marqué (mais maintenance en couple possible) pondeur sur substrat découvert (donc décor légèrement différent).
- Autre hemichromine relativement calme : Hemichromis cristatus . Spécificités : ponte sur substrat découvert OU caché selon les couples et le contexte ; peut montrer des tendances prédatrices envers les petits poissons et invertébrés.
- Les spp. du genre Pseudocrenilabrus : Les multicolor sont relativement peu agressifs à défaut d'être calmes, les nicholsi sont plus violents. Maintenance relativement proche (plages de sable, ruptures visuelles et cachettes indispensables) mais mode de reproduction différent (incubation buccale maternelle, ne forme pas de couples) qui implique une maintenance en harem dans des petits volumes, et un temps de repos pour les femelles entre les périodes d'incubation.
Voilà! J'ai dû oublier plein de trucs! N'hésitez pas à apporter des compléments ou à demander des éclaircissements! Et... Bonne chance avec vos petits fluviatiles! :bounce: